« Dans Je suis la bête, j’ai voulu essayer de renverser les perspectives. Donner langue à une histoire où la compassion est pour une fois du côté de l’animal. A la place de l’homme, la bête entend cette fois l’enfant, être d’argile qui sera modelé tour à tour par l’une puis par l’autre.
Cette situation est intensément romanesque dans la mesure où il s’agit de décrire avec une précision extrême quelque chose qui n’a jamais été raconté : le monologue d’un enfant sauvage qui vit, chasse et combat dans la forêt. Quelle langue donner à un tel récit ? Quel est l’accent de la sauvagerie, ce parler particulier d’une expérience tellement impressionnante que l’on n’en pourra point douter ?
Tel a été pour moi l’un des enjeux les plus palpitants de ce livre : trouver cette scansion de fond de gorge, de fond de bois, qui remonte peu à peu jusqu’au rebord de ses lèvres. Inventer un langage qui donnera voix au fantastique, c’est-à-dire à une réalité insoupçonnable, au delà des marges, au delà de tout. »
Anne Sibran
Lecture publique de « Je suis la bête » par Christine Boisson dans le cadre de « Nîmes Culture » partenariat avec la SACD et France Culture, lecture retransmise en direct sur France Culture le 6 juillet 2007.